Ce matin, c’est la rentrée des classes.
Mes filles, Fleurette et Fleurine, sont à la fois excitées et stressées à cette idée. Depuis deux jours, toutes les conversations tournent autour de ce sujet. Quelle tenue vais-je porter ? Quelles affaires vais-je prendre ? Quelle coiffure vais-je me faire ?
Ces questions peuvent paraître tellement superficielles si on n’y prend pas garde. Après tout, quoi de plus superficiel que l’apparence ?
Pourtant, ces questions acquièrent une importance capitale quand on prend le temps de les analyser avec un peu de recul.
J’aimerais vivre dans un monde où l’apparence ne compte pas ou du moins, pas autant que dans notre société. Mais, ce n’est pas le cas.
Depuis que mes filles sont toutes petites, je les laisse s’habiller comme elles veulent et leur dis qu’on s’en fiche de ce qu’en pensent les autres, tant qu’on reste respectueux dans sa façon de s’habiller. (Non, on ne rentre pas dans une Mosquée les épaules dénudées. Non, on ne sort pas dans la rue toute nue.)
C’est ce que j’ai appris en grandissant car enfant et adolescente, j’accordais une importance démesurée à ce que les autres penseraient de moi. Quand j’ai pu me libérer de cette pression que je m’infligeais, je me suis persuadée que si j’avais pu m’en libérer plus tôt, j’aurais été plus heureuse.
Mais est-ce si sûr ?
J’étais convaincue qu’une partie du bonheur de mes enfants passerait par s’en foutre. D’ailleurs, mon chéri en avait rien à faire de son apparence et n’en avait jamais souffert. Les choses me paraissaient donc simples.
C’était oublier une dimension essentielle. Voire deux.
L’humain est profondément sociable et a besoin de se sentir intégré.e dans le groupe dans lequel il/elle évolue.
Et la société dans laquelle nous évoluons actuellement est profondément sexiste et misogyne.
Les exigences portées sur les garçons concernant leurs tenues vestimentaires ne sont pas aussi fortes que celles qui pèsent sur les filles.
Mes filles sont donc confrontées à des parents qui leur balancent des beaux discours de confiance en elles tout en devant affronter des copains-copines de classe qui les moquent car elles ne rentrent pas dans le moule.
Cette évidence m’est apparue cet été au détour d’une conversation avec une amie dont la fille est racisée. Elle me disait qu’elle comprenait tout-à-fait ma position de laisser mes enfants s’habiller librement. Mais, qu’elle ne le faisait pas avec sa fille. Car elle avait déjà assez à affronter avec le racisme. Si en plus, elle se permettait de sortir des rangs en matière vestimentaire, cela ne ferait qu’accentuer les choses. Elle laissait donc une marge de liberté de choix à sa fille mais dans un cadre assez strict pour la protéger.
Je me suis alors beaucoup questionnée sur les conséquences du choix que j’offrais à mes propres filles. Certes, elles sont blanches. Mais, elles sont aussi neuro-atypiques, ce qui est déjà, en soi, une source de discrimination. Est-ce que je les aidais vraiment en leur laissant une pleine liberté ?
J’en suis arrivée à la conclusion que oui, mais à une seule condition, que je n’avais pas remplie jusque là : leur expliquer les conséquences de leur choix.
J’ai donc eu une conversation importante avec Fleurette, 10 ans. Je lui ai expliqué qu’elle avait deux possibilités, selon moi, pour choisir ses vêtements.
Soit, elle s’habille exactement comme elle veut, parce que c’est à elle que sa tenue doit plaire, avant toute chose. Mais, dans ce cas, elle doit savoir que certains et certaines en profiteront pour se moquer et qu’elle sera isolée.
Soit, elle a conscience qu’elle ne peut pas changer les gens et que, même si c’est injuste et stupide qu’ils agissent ainsi, elle ne se sent pas l’envie ou la force d’affronter cette méchanceté. Et dans ce cas, elle s’habille selon la norme. Pour être passe-partout et ne pas se faire remarquer.
Ce week-end, j’ai repris cette discussion avec Fleurette. Elle m’a dit qu’elle y avait réfléchi et qu’elle allait faire un mélange des deux. S’habiller “dans la norme” mais avec des vêtements qu’elle aime quand elle n’a pas l’énergie d’affronter les gens. Et s’habiller selon ses envies sans égard pour la norme les jours où elle se sent forte.
Voilà probablement le meilleur compromis possible.
Fleurine, quant à elle, sur le spectre de l’autisme, n’a pas voulu participer à la conversation mais a écouté de loin.
Ce matin, elles étaient toutes les deux pressées de montrer leur tenue aux copains-copines.
J’ai hâte d’avoir leur retour sur cette première journée.
Et vous ? C’était comment la rentrée de vos loulous et louloutes ?
La rentrée est une période tellement compliqué pour nos enfants, certains ont la chance de connaître déjà « l’ecole » ou certains copains…
Mais imaginez que tous les ans on vous change de collègue et de chef sans vous demander votre avis…
Compliqué hein !
Je trouvais important de rappeler que la rentrée si « banale » qu’on a tous vécu est un véritable cap pour certains et en ça je te rejoins sur le fait de leur laisser la liberté en expliquant « le risque » de leur laisser faire leurs choix. C’est le premier jour de rencontre et une première impression c’est important !
C’est important de savoir « pourquoi » « pour qui » on fait les choses 😊